Etape 87: L'ascension du Salkantay, l'échec moral
- elo-diem
- 10 juin 2016
- 4 min de lecture

Mercredi 23 mars 2016
La nuit fut difficile pour Tristan, son duvet est trop léger, il a eu froid, il es sûrement tombé malade. Il a plu des cordes non stop, heureusement que notre tente était bel et bien imperméable.
Nous nous réveillons malgré tout avec du soleil, tout est humide mais on aperçoit au loin la montagne enneigée, c'est très joli. On a été trop lent pour tout ranger, nous essayons tant bien que mal de faire sécher la tente et mangeons notre premier petit déjeuner, debout. Ensuite nous avons découvert les joies de la toilette au lavabo avec eau gelée, ça nous a bien réveillé en tout cas.
Nous partons plus tard que prévu et nous arrêtons dans une petite maison de locaux pour leur acheter des piles pour ma frontale. Nous commençons notre deuxième journée, les paysages sont incroyables, nous traversons des plaines sauvages, entourées par une petite rivière, nous dépassons des chevaux sauvages, et avançons toujours plus vers la montagne au nez blanc.


Cette journée, nous le savions, allait être là plus difficile et malgré le baume du tigre, remettre son sac sur les courbatures est un supplice. Nous montons pas mal, je pensais que c'etait le gros dénivelé mais j'ai compris ensuite que nous ne l'avions pas encore passé, mon moral en prend un coup parce que j'avais déjà pas mal galéré.
Nous arrivons en bas du fameux passage difficile, Tristan m'enlève des trucs du sac, il voit que je souffre. Nous prenons une barre de céréales et nous entamons notre ascension jusqu'à 4 600 mètres d'altitude. On a passé des zones rocheuses, des ruisseaux, des petites plaines, heureusement il n'y avait pas de grand soleil, la fraîcheur nous sauvait. La pente était raide et chaque pas faisait souffrir. Pour la dernière montée avant le sommet il s'est mis à pleuvoir, nous avons du mettre nos ponchos et je ressemblais à un énorme m&ms rouge désabusé.
Le paysage devenait chaotique et Volcanique, la végétation disparaissait peu à peu. Nous avons atteint le sommet du Salkantay. On s'est assit reprendre notre souffle mais il faisait froid, il fallait se remettre en route rapidement. Ne nous restait plus que du dénivelé négatif celui qui fait mal aux genoux ! Il pleuvait toujours et nous descendions le plus vite possible entre les rochers, nous étions dans les nuages et ne voyait rien à plus d'un mètre.
Nous avons dépassé des texans malaimables, j'allais à toute allure, je voulais que ça se finisse. On avait toujours rien mangé et Tristan blanchissait à vue d'oeil. Je voyais de l'autre côté de la rivière un bel endroit pour manger, nous avons enlevé nos chaussures pour le traverser puis nous nous sommes enfin arrêté.

On essaye tant bien que mal d'organiser un mini campement, mais le temps fait défaut, il se met parfois à pleuvoir. Nous cuisinons de la semoule et du bacon dans notre réchaud, ça a le mérite d'être bon et de remonter le moral aux troupes, qui, il faut le dire, en ont vraiment chier ce matin.
Pendant ce repas des chevaux sauvages traversent la rivière devant nous, c'est un moment d'osmose incroyable, c'est ce genre de chose que nous étions venu chercher à travers ce challenge fou.
Il ne faut pas traîner car la nuit nous rattrape vite, il nous reste encore énormément de route. Le dénivelé négatif nous fait souffrir à cause du poids des sacs, ce n'est vraiment pas une partie de plaisir. Tristan a retrouvé des couleurs mais n'a toujours pas l'air au top. Nous continuons d'avancer en silence dans le brouillard, aussi vite que possible. La nuit nous rattrape, ça me tort le ventre, il faut qu'on s'arrête, il faut qu'on se repose. On trouve un campement abandonné dans les nuages et l'humidité, on prend.
La tente est montée de jour, sur du beau gazon à plat, c'est une première victoire! Je cherche à entrer dans la maison abandonnée, je me dis qu'une nuit sans humidité ce serait vraiment pas du luxe ! Mais impossible de forcer les fenêtres sans les briser alors j'abandonne. La mission d'après était de trouver du bois sec et de tenter un feu qui pourrait chauffer notre nourriture, notre eau pour la toilette et nos coeurs pour la nuit. Je pars faire la vaisselle plus haut, près de la rivière. L'eau me gèle les mains et quand je lève la tête je réalise que je suis seule dans la jungle péruvienne, entourée de brouillard, à laver mon assiette dans l'eau. C'est déroutant, j'étais à l'affût du moindre bruit animal.
Les bouteilles d'eau sont remplies, on y met les pilules d’assainissement et on essaye de faire bouillir le reste. Le feu ne prend pas et la nuit est bientôt noire. Je décide de faire chauffer de l'eau sur le réchaud et de me laver là, comme ça, à poil dans les nuages. Il fait très froid, je pousse des cris, me savonne le plus rapidement possible, Tristan tient la casserole et me fait couler l'eau sur les cheveux. J'ai mis des heures à me réchauffer et lui aussi. Le feu 🔥 n'est jamais partit et ça nous a vraiment miné le moral. On a fini dans la tente à manger notre repas trop épicé sans rien y voir.
Un verre de pisco, un peu de musique. On n'a pas la force de masser nos muscles. Je m'endors..
Dans la nuit, Tristan me réveille, c'est une crise de panique… La fatigue, l’altitude, il est malade, limite fiévreux. C'est l'angoisse, il faut garder son calme parce qu'il n'y a absolument rien autour de nous, je commence à avoir peur mais je ne dis rien et essaye de faire face. Il faut se calmer, respirer. Il a froid et ça fait déjà deux nuits de suite alors c'est vraiment pas facile pour lui. Il part prendre l'air dehors, la lune éclaire de toute ses forces et les nuages sont partis, ça fait du bien mais on se sent toujours aussi seuls..
Bilan jour 2: 800 mètres de dénivelé positif, 800 mètres de dénivelé négatif, campement un peu après Huairaspampa à 3354 mètres d'altitude, 9 km parcourus.
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