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Étape 110: Les aigles ne volent pas avec les pigeons.

  • elo-diem
  • 11 août 2017
  • 2 min de lecture

Jeudi 10 août 2017 Échec, vous connaissez ce mot? Oh oui vous le connaissez tous. Pour ma part il définit, compose et possède mon année. J'avais imaginé plusieurs types d'échec avant de partir: celui de l'altitude, celui du physique, celui de la blessure, celui du mental... Mais j'avais complètement renié celui de la météo, qui finalement nous mène directement à l'échec psychologique et ce, sans aucune transition.

Il nous est impossible de décoller de Kathmandu. On est arrivées de nuit un peu stressées à l'aéroport et on en est ressortie presque 9h plus tard vidées, exténuées, affamées.

Au début le retard n'a inquiété personne et petit à petit j'ai compris. J'ai vu l'Everest se décrocher devant mes yeux puis tomber à mes pieds. Tant de préparation, tant d'investissement, tant de boulot, tant d'espoir, pour échouer à cause de la pluie. Je me retrouvais tout aussi bloquée à l'aéroport que dans ma tête. Triste et impuissante, les bras ballants, toute penaude, sans parachute ni rappel, pas de plan B, quelle stupidité!

La nature nous a prise par le col, nous a plaqué au mur et nous a demandé de nous calmer "et quoi! Tu pensais que tu allais y arriver si facilement, avec un avion?!". C'est elle la plus puissante de toute, elle m'a lâché, je me suis inclinée, elle a raison de me le rappeler. Je disais qu'on était capable de tout, de faire la même chose que n'importe qui mais j'avais oublié, oublié qu'elle est l'adversaire le plus redoutable et qu'en fait c'est elle que je suis venue défier ici. 

Je ne suis personne et vous n'êtes personne, peu importe votre nom, votre statut, ce que vous avez fait, votre âge, votre couleur, votre foutu pouvoir, peu importe vos vêtements et vos croyances, vos armes et vos billets, lorqu'elle l'aura décidé vous disparaitrez par feu, vent, pluie ou marrées, un bref souvenir puis plus rien, il fera noir et silencieux. Qu'on ne vienne plus me dire que je suis déraisonnable parce que bordel la raison n'a tout bonnement aucune saveur.

J'ai refoulé et mon corps s'est éteint sans bruit sur le banc en fer bleu pendant plusieurs heures, un triste et long sommeil au goût du supplice de Tantale où ma main ne savait atteindre la montagne.

Les rires sont étouffés cette nuit, de peur d'avoir à les payer demain. Je me suis accordée ma première vraie douche pour laisser couler dans les égouts, l'entièreté du degoût. 

Vendredi 11 août 2017

Même heure, même rituel. Mais cette fois nous allons à l'aéroport comme à l'abatoire, la queue entre les jambes et les yeux rivés sur le sol. On y retrouve les personnes de la veille, on fait des pronostics. La naïveté a disparu de nos visages et les lieux nous sont devenus presque familiers, nous prenons notre café, nous discutons.

Il est déjà 8h, le vol a été décalé 3 fois. Nous avons décidé qu'à 10h, nous demandons remboursement de nos billets, nous récupérons nos sacs, nous retournons à Kathmandu et nous essayons d'atteindre en Jeep ou en bus une ville qui s'appelle Phaplu ou Ringmu, puis, nous marcherons 2 jours pour atteindre Lukla.

Tout ça ne sont que des suppositions, je ne sais pas si nous allons y arriver mais la seule manière de le savoir... C'est d'essayer.

 
 
 

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